Un retour au collectif et à une quête spirituelle individuelle
A l’époque de la préhistoire, des sociétés de chasseurs-cueilleurs, ce sont des croyances animistes qui prédominent, attribuant aux êtres et aux choses une âme. Cette religion communément appelée chamanisme correspond plus précisément à l’attribution d’une force surnaturelle à la nature avec laquelle on échange. On dialogue avec la nature sans que l’homme ait une place spécifique.
Puis au grand changement de l’ère néolithique lorsque les humains ont commencé à se sédentariser, ils se sont coupés de la nature en créant des Villages, des Cités, des Empires, des Etats, le divin s’est personnifié, les Dieux sont apparus avec la notion de sacrifices pour demander protection, abondance, fertilité des terres.
Les Dieux ont d’abord été des femmes jusqu’à ce qu’apparaisse la hiérarchie des prêtres.
C’est une religion collective, sacrificielle, de groupe, de communauté.
A la période dite axiale (7è-5è siècle avant J-C.) que ce soit en Chine, en Inde, en Grèce ou en Palestine, adviennent de nouvelles préoccupations qui se tournent vers un salut individuel, l’individu se préoccupe de son propre salut se posant des questions existentielles. C’est l’apparition des grands maîtres spirituels tels que Bouddha, Jésus, Confucius. Ils enseignent à des disciples pour transmettre une expérience spirituelle, il s’agit de vivre sa propre expérience spirituelle. On s’éloigne de la communauté.
On passe d’un rituel collectif à une expérience individuelle qui permet de faire un travail sur soi.
Aujourd’hui alors que nous sommes dans un contexte global de mondialisation, dominé par le progrès et la science, par une vision rationnelle qui a pendant de nombreuses années laissé penser à la fin des religions, il se trouve qu’en réalité il n’en rien, que les religions survivent, s’adaptent voire prolifèrent.
En effet, même si nous constatons un déclin de la participation religieuse dans les pays occidentaux (sécularisation) et une laïcisation progressive des États, il apparaît une résurgence de toutes sortes de religiosités (l’islam, l’évangélisme protestant, le renouveau du christianisme, la résurgence des religions en Chine, le néo-chamanisme chez les Amérindiens, différentes sectes et autres mouvements religieux, le Next Age). Ce regain d’intérêt fait face au développement quasi inéluctable d’une idéologie libérale unique individualiste et matérialiste et apporte également un soutien communautaire avec des réponses différentes à ce dogme dominant. Des populations qui rejettent ce diktat du profit et de l’intérêt particulier et qui cherchent d’autres valeurs plus proches de leurs aspirations dans les religions.
Plus précisément, deux phénomènes dichotomiques se rencontrent laissant effectivement entrevoir une période de profond changement: un retour au collectif par un réveil identitaire parallèlement au développement d’une individualisation du religieux ainsi que l’accroissement d’une quête spirituelle individuelle.
Un réveil identitaire qui se déroule dans un contexte de mondialisation, de troubles de repères où se confrontent différentes cultures utilisant la religion comme symbole identitaire d’un peuple, d’une nation ou d’une civilisation en période de crises.
Un mouvement pouvant aller jusqu’à des manifestations radicales : avec la montée de l’intégrisme catholique; du fondamentalisme protestant; de l’islamisme; des ultra-orthodoxes au sein du judaïsme; des fondamentalistes hindous. Ces manifestations sont l’expression d’une rupture avec la modernité, avec les idéologies du progrès, des courants refusant l’adaptation au monde moderne et souhaitant maintenir la tradition et l’influence du religieux dans le politique et dans la société.
Parallèlement nous voyons apparaître une quête spirituelle individuelle, qui revêt un caractère beaucoup plus personnel du sacré. Les individus cherchent un sens à leur vie en s’inspirant à la fois de la philosophie, du développement personnel, des sagesses orientales, du yoga… On parle de «bricolage religieux», d’une religion « à la carte », d’une individualisation du religieux lié à l’évolution d’une société qui ne croit plus aux promesses de la science, du progrès, de la politique mais qui reste confrontée par ailleurs aux questions existentielles.
Au sacré considéré dans une approche verticale, avec une distance entre le corps et l’esprit, c’est-à-dire entre la matière et le divin; on assiste aujourd’hui a un changement profond avec une approche plus horizontale du sacré. Le divin semble désormais se trouver en nous, à côté de nous. Il s’agit d’une reconnexion de l’homme avec lui même, avec la nature, avec le cosmos, faisant partie d’un grand tout.